Portraits d'ardéchois

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Henri CHARRIÈRE dit Papillon


1906-1973


Aventurier et écrivain

Henri Charrière est né le 16 novembre 1906 à Saint-Étienne-de-Lugdarès en Ardèche. Ses parents, Joseph Charrière et Marie-Louise Thierry, sont tous deux enseignants. Il est le troisième enfant et seul garçon de la fratrie. En 1910, la famille s'installe à Pont-d'Ucel près d'Aubenas, il fréquente l'école communale où enseignent ses parents. Henri est un enfant turbulent, indiscipliné, rebelle mais généreux. Son père sévit mais doit partir pour la guerre en 1914. Henri se transforme en chef de famille auprès de sa mère et en chef de clan auprès des enfants de son âge.

Henri Charrière était connu dans la région d’Aubenas comme un Saint-Benoît (terme qui a l'époque désignait les malfaiteurs et qui désigne un quartier d’Aubenas peu fréquentable à cette époque).

Après le retour de son père blessé, en 1917, le décès de sa mère, le 7 octobre 1917, le chagrin du jeune Henri est immense ; il reste perturbateur, il devient agressif et querelleur. Son père le met en pension à Crest dans la Drôme. À l'occasion d'une bagarre, il blesse sérieusement un de ses camarades. Pour éviter les poursuites judiciaires, il n'a que 17 ans, son père lui fait signer un contrat d'engagement dans la Marine Nationale. Après son passage à Toulon, il se retrouve dans un régiment disciplinaire en Corse : à Calvi où il se fait tatouer un papillon sur la poitrine (ce qui lui valut son surnom "Papillon"), puis à Corte. Dans ce régiment il va rencontrer des têtes brûlées qui vont l'orienter insensiblement vers l'illégalité et les hors la loi.

Il sera réformé de la Marine le 28 avril 1927, de la Marine après s'être mutilé sciemment un pouce gauche. De retour en Ardèche dès le mois de mai, il écume les bals populaires, avec bagarres et larçins à la clé. Un temps il joue au rugby à Aubenas. Il passe les concours pour intégrer l'administration. Il réussit, mais son dossier militaire ne plaide pas en sa faveur.

Vexé, il se retrouve à Paris où il va mener une vie agitée et dissolue pendant deux ans. Il est garçon de café à Pigalle. Ses revenus sont améliorés par sa compagne, Jeannette Fourel, dite "Nénette", peu farouche pour ses dix-huit ans.

Un soir de mars 1930, il est mêlé à une histoire de meurtre : un certain Roland Legrand, officiellement charcutier, officieusement souteneur, est blessé par balle d'un seul coup de revolver dans le ventre, à 3 h 30 du matin, il meurt le 27 mars, après avoir désigné son meurtrier par un mot : "Papillon". Henri Charrière est suspecté, malgrè l'absence de preuves et de témoins; il niera toujours y avoir participé.

Henri Charrière dit "Papillon"Henri Charrière fut jugé et condamné aux travaux forcés à perpétuité, au bagne en Guyane française, le 28 octobre 1931, pour le meurtre de Roland Legrand, meurtre qu'il a toujours nié. Il quitte la citadelle de Saint-Martin-de-Ré le 29 septembre 1933 à bord du bateau "La Martinière" et débarque le 14 octobre avec le statut de "transporté" à Saint-Laurent-du-Maroni.

Vont suivre treize années de bagne en Guyane. Commence alors la plus fantastique des aventures.

Il est d'abord affecté comme infirmier à l'hôpital colonial. Il échappe aux chantiers forestiers, où l'espérance de vie n'est pas élevée. S'estimant victime d'une erreur judiciaire, il ne songe qu'à s'évader.

Première évasion

Quarante-trois jours après son arrivée au bagne, Papillon s'en évade une première fois le 5 septembre 1934, pour un périple de trois mois : 2.500 km en mer, l'île de Trinidad, les Anglais, la Colombie et ses cachots sous-marins, les indiens Guajiros, les cavales de Baranquilla. La Colombie rend les bagnards évadés à la France. Il passe deux ans dans les cellules de la réclusion de l'île Saint-Joseph, en mai 1935 (Papillon restera deux ans dans une cage à fauves). Plusieurs fois transféré, il finit comme infirmier-chef dans un camp d'Indochinois sur le continent guyanais, le camp forestier des Cascades en 1943.

Seconde évasion

Après plusieurs tentatives, et, enfin, au bout de treize ans, il s'évade dans la nuit du 18 au 19 mars 1944 avec quatre autres compagnons. Après de nombreux déboires, un passage par la Guyane anglaise, la traversée de l'océan dans un canot d'abord, l'enfermement dans un bagne au Venezuela ensuite ; il parvient à Caracas au Vénézuela en 1946. Puis au bout de toutes ces épreuves, de toutes ces souffrances, cette fois, il y a la Liberté. Il sera naturalisé, se mariera avec Rita Alcover et finira sa vie dans ce pays.

Devenu commerçant respectable, Papillon exploite un hôtel, il s'installe avec Rita à Caracas. Ils géreront plusieurs années des hôtels, restaurants et discothèques car il a gardé son sens de l'accueil et de la fête.

En 1956, il embarque pour l'Europe avec son nouveau passeport de citoyen vénézuélien. Il retrouve en Espagne ses deux sœurs. De retour au Vénézuela il gère une entreprise de pêche aux crevettes, puis un restaurant. La prescription de sa peine arrivant en 1967, Papillon peut fouler le sol français.

De sa vie en Guyane, Papillon H. Charrièreil écrivit un livre réputé autobiographique à grand succès, vendu à plusieurs millions d’exemplaires : "Papillon" édité par Robert Laffont en 1969. C'est le succès du livre "L'Astragale" d'Albertine Sarrazin, un autre récit d'évasion, qui l'y aurait encouragé.

L'aspect autobiographique a été contesté par différentes investigations. Empruntant plusieurs anecdotes survenues à d'autres bagnards. Les "Papillon" dont les aventures sont relatées s'appelleraient  :

Charles Brunier, né le 31 mai 1901, militaire et soldat français. Il a été compagnon de bagne de Charrière, ayant passé 15 ans à l'île du Diable en Guyane. Son parcours fut surtout militaire, avec un comportement émérite au cours de la Seconde Guerre mondiale, lui permettant en 1948 d'être blanchi de sa condamnation à perpétuité en 1923 pour avoir mortellement blessé à l'arme blanche un souteneur. Il s'évadera également à plusieurs reprises en 1925, 1926, 1928, 1936 avec "Papillon" et 1939 au Mexique d'où il rejoindra  les Forces françaises libres.

René Belbenoît né le 4 avril 1899, prisonnier et bagnard français. À la suite d'une évasion, il est repris, condamné à trois ans de travaux forcés supplémentaires. Il est renvoyé en Guyane en 1933, par le même cargo, en compagnie d'Henri Charrière. Il réussira à sévader à nouveau ; se retrouvera à Los Angeles. Traqué de toute part, car la pression française ne se relâche pas, Belbenoit finit par repasser à la nage le Rio Grande pour gagner le Texas où il est immédiatement arrêté. Sa peine purgée, Belbenoit est sauvé par la guerre de l'extradition vers la France - échappant, très vraisemblablement, à un nouveau séjour en Guyane.

Sortant brutalement de l'anonymat, Henri Charrière devient une vedette publique : rencontre avec le show-biz, plateaux télé, tournées internationales, car le livre est traduit en de nombreuses langues.

En pleine gloire, Henri Charrière décide de retrouver les lieux de son enfance en compagnie de Rita. Nous sommes début septembre 1969. Il passe l'Escrinet, s'arrête à Pont-d'Ucel à l'école de son enfance et retrouve ses amis et l'émotion le submerge : c'est son premier voyage en Ardèche depuis quarante-deux ans.

Des ouvrages sont publiés avec la volonté évidente de contester le livre et le personnage "Papillon". Ces polémiques n'empêcheront pas le livre "Papillon" d'être un succès littéraire fulgurant battant de nombreux record d'édition, il sera d'ailleurs vendu à plus de 13 millions d'exemplaires dans le monde.

Rita lassée préfère s'installer en Andalousie en 1971 avec Henri qu'elle vient d'épouser.

Une adaptation cinématographique américaine du livre a été tournée : le film de Franklin J. Schaffner réunit Steve McQueen dans le rôle de "Papillon" et Dustin Hoffman.

Henri Charrière, "Papillon", apprend au printemps 1973 qu'il est atteint d'un cancer de la gorge. Il meurt le 29 juillet 1973 à Madrid, en Espagne. Il est enterré dans le petit cimetière de Lanas, près d'Aubenas

 

Un documentaire, "Cayenne Hollywood", est aussi réalisé en 2009 et retrace la vie authentique de deux bagnards célèbres : Henri Charrière et René Belbenoit.

En Savoir Plus

L‘ardèche est un département fascinant avec de nombreuses communes pittoresques et des personalites natives attachantes.

    Sources

     

  • Papillon; Robert Laffont, Paris, 1969
  • Banco, Robert Laffont, Paris, 1972
  • Papillon libéré : La vie d'Henri Charrière”, Vincent Didier, La Fontaine de Siloë, 2007
  • Papillon épinglé par Gérard de Villiers, Éditeur : Robert Laffont, 1970