Naissance de la nation américaine

Menu

VI
Industrialisation des Etats-Unis
1865-1918

3. Crises, mécontentements et réformes

L' expansion s'accompagne de crises économiques violentes (1873, 1884, 1907).
C'est à cette époque qu'apparaît le syndicalisme américain, qui lutte avant tout pour l'amélioration des conditions de travail (augmentations des salaires, réduction du temps de travail).
Ces revendications déclenchent un conflit sans précédent entre le capital et le monde du travail.

Comme lors de la Grande Dépression en Europe, qui nourrit les doutes sur une résistance politique grandissante du capitalisme mondial, les principales caractéristiques de cette dépression sont la déflation, le déclin rural et le chômage (indicatif de sous-consommation), qui aggravent les dures protestations sociales de l'Âge d'Or - le mouvement populiste, la croisade free-silver, et des violents conflits ouvriers tels que la grève Pullman. De même, la période post-1873 en Europe voit une réémergence des organisations militantes dans les classes ouvrières et des cycles de grandes grèves. De fait, le passage rapide à l'impérialisme de la fin du dix-neuvième siècle peut être corrélé avec les cycles de dépressions économiques qui affectent de nombreuses classes d'élites.

Les États-Unis connaissent aussi des problèmes sociaux comme le racisme (Ku Klux Klan ) et les problèmes liés à l'alcool (interdit par la Prohibition )

1- Les difficultés des agriculteurs

Malgrè les progrès techniques, les agriculteurs américains de l'ouest eurent à affronter de nombreuses épreuves: appauvrissement des sols, caprices de la nature, surproduction de certains secteurs et absence de législation de soutien au monde rural.

Plus les colons progressaient vers l'ouest, plus ils devenaient dépendant des chemin de fer pour commercialiser leurs produits et plus ils étaient endettés auprès des banques. Les métayers cherchaient à échapper à l'endettement en augmentant leurs récoltes, ce qui provoqua surproduction, épuisement des sols et effondrement des cours.

National Grange "The National Grange of the Patrons of Husbandry.", une association d'agriculteurs fut créée en 1867 pour résoudre les problèmes du monde paysan, particulièrement pour amener producteurs, consommateurs et industriels à des relations commerciales directes sans intermédiaires ou financiers. La Grange créa ses propres réseaux de commercialisation, des usines de transformation et conditionnement, ses propres coopératives. Elle obtint dans quelques États des limitations des tarifs des transports et du stockage. Les agriculteurs de l'Ouest, endettés et hostiles aux barrières douanières, expriment leur mécontentement au sein du mouvement.

Farmers' Alliance et Populist PartyL'association, en perte de vitesse, fut remplacée par les "Farmers' Alliances", organisations politiques qui défendaient des programmes économiques. Alors que dans le sud se créait la "Colored Farmers National Alliance" regroupant des agriculteurs Afro-Américains.
Les Farmer's Alliances tentèrent d'occuper la scène politique avec l'aide de sympathisants démocrates et de petits partis en créant le "Populist Party". Mais la question monétaire, qui dressait les uns contre les autres les partisans de l'argent et ceux de l'or, n'allait pas tarder à éclipser tous les autres problèmes. La panique financière de 1893, aggrava la tension. Puis la situation financière s'améliora et la guerre hispano-américaine éclipsa l'attention des préoccupations populistes.

2- Les Luttes sociales

Au XIX e siècle les conditions de travail des ouvriers américains étaient précaires et les salaires étaient bas pour un nombre important d'heures de travail hebdomadaire. La situation était encore moins enviable pour les femmes et les enfants qui représentaient un pourcentage élevé de la main d'œuvre. Les crises économiques successives amputaient les salaires et entrainait un chômage important. Les immigrants continuaient cependant à affluer à la recherche d'un emploi.

C'est en 1874 que le Massachusetts limita, pour la première fois aux États-Unis, à dix heures la durée du travail quotidien des femmes et des enfants. C'est seulement en 1930 que le gouvernement fédéral se préoccupa de cette question. En effet pour des millions de personnes les conditions de travail et de vie étaient déplorables. En 1900, les ouvriers de la sidérurgie travaillaient douze heures par jour pour un salaire très inférieur au minimum pour vivre décemment.

Le syndicalisme américain dont l'apparition est relativement tardive, à la différence du mouvement ouvrier européen, ne met pas en question le régime. Il est à peu près complètement dépourvu de traditions et de préoccupations idéologiques: Samuel Gompers, animateur de l' AFL est résolument réformiste. C'est d'ailleurs un syndicalisme d'élite, limité à une aristocratie professionnelle d'ouvriers qualifiés.

En 1869 des associations de travailleurs se créent au plan national avec le "Nobel Order of the Knights of Labor", syndicat fondé par les ouvriers de la confection à Philadelphie, ouverte à tous les travailleurs, y compris les Noirs, les femmes et les agriculteurs. En 1885, l'organistaion déclencha une grève dont elle sortit victorieuse contre Wabash Railroad controlé par le baron Jay Gould.

Le "Knights of Labor" fut remplacé par l' "American Federation of Labor" (AFL) en 1886, dont les objectifs étaient purs et simples ("pure and simple unionism"): meilleures conditions de travail et augmentation des salaires. L'obstination du patronat à refuser de satisfaire les revendications des travailleurs déboucha sur les plus importants conflits sociaux que connurent les États-Unis.

Certains commencaient à douter de la bienfaisance absolue du système. Ici ou là parmi les catégories les plus défavorisées de salariés, dans les métiers les plus durs ou les plus exposés, sous la direction de meneurs plus résolus, éclatèrent de brusques mouvement de mécontentements, dont la violence trahissait une colère accumulée et faisait pressentir une aspiration en faveur de réformes profondes.

• La grève du rail de 1877 - suite à une baisse des salaires de 10% - fut réprimée par les troupes fédérales.

Entre 1886 et 1887, on dénombre quelque 3000grèves aux États-Unis:

• En 1886, une bombe fut lancée sur des participants à une grève à la Cie McCormick Harvester de Chicago, faisant 9 morts et 60 blessés.

• En 1892, à l'usine Carnegie de Homestead en Pennsylvanie, les grèvistes de deux syndicats de métallurgistes ouvrirent le feu sur un groupe de briseurs de grèves (de l'agence Pinkerton), faisant dix morts.

• En mai 1894, lors de la crise économique de 1893-1894, une grève violente menée à Chicago, à la compagnie des wagons-lits Pullman soutenue par le Syndicat des chemins de fer américains entraina la paralysie du réseau ferroviaire. Le président Cleveland finit par envoyer les troupes fédérales pour faire cesser le mouvement.

• En 1903, le syndicat "International Workers of the World" favorable à la grève, se distingua au cours d'affrontements dans les mines du Colorado et plus tard en 1912 dans l'entreprise de textiles Lawrence.

3- Les Réformes des Réformistes

Président William McKinley (1897-1901)

Lorsque le Reich Allemand réagit à la dépression par l'adoption de barrières douanières protectionnistes en 1897, les États-Unis les imitent avec l'élection écrasante de William McKinley (1897-1901), qui s'était distingué six ans auparavant avec les Barrières Douanières McKinley de 1890. Il est réélu pour un deuxième mandat. Les républicains se félicitèrent de l'issue victorieuse de la guerre avec l'Espagne, du retour de la prospérité et des efforts déployés par les Etats-Unis pour accéder à de nouveaux marchés grace à la politique de la porte ouverte avec la Chine.

Président Theodore Roosevelt (1901-1909)

En septembre 1901 le président William McKinley fut assassiné par un anarchiste; Theodore Roosevelt (Républicain), vice-président le remplaça à la présidence.

• Dans son allocution du 3 décembre 1901 devant le Congrès il demande le contrôle du pouvoir des entreprises créées par fusion/acquisitions, les "trusts". C'est l'ère du "trust-busting".

Theodore Roosevelt accentue la lutte du pouvoir fédéral contre les excès du libéralisme et la multiplication des trusts (loi Elkins, 1903; loi Hebburn, 1906). Ceux-ci exercent en effet un quasi-monopole sur des secteurs comme le pétrole, le bœuf, le charbon, le sucre ou les chemins de fer. Le département du Commerce et du Travail créé par le Congrès permettait de vérifier les activités des grosses sociétés en cas de regroupements des activités. Plusieurs grandes compagnies furent épinglées: l' "American Sugar Refining Company", la "Standard Oil Company of Indiana"

• Le président joue le rôle d'arbitre dans les conflits du travail (grève des mineurs de Pennsylvanie en 1902)
• Il fit adopter des Lois réglementant les tarifs ferroviaires, pour mettre fin aux abus des compagnies ferroviaires.
• Il promulgue une Loi, en 1906, réglementant la qualité des produits alimentaires mis sur le marché. La viande vendue dans le cadre du commerce entre États devait obligatoirement être soumise à l'inspection des services fédéraux.

• Le président Th. Roosevelt fut également à l'origine d'un programme de création des richesses naturelles et de lutte contre les gaspillages, ainsi près de soixante millions d'hectares de forêts furent protégés et reboisés, afin de lutter contre les promoteurs immobiliers malhonnêtes.

• Plus de la moitié des États avaient institué la journée de huit heures pour les fonctionnaires; des dispositions concernant les accidents de travail rendaient l'employeur juridiquement responsable.

Président William Howard Taft (1909-1913)

En 1909, William Howard Taft succède à Theodore Roosevelt et s'efforça de poursuivre les réformes de son prédécesseur. Il poursuivit la lutte contre les trusts, étoffa la fonction publique, créa la caisse d'épargne à la poste et un service des colis postaux, et fit voter deux Amendements à la Constitution:
- le Seizième Amendement autorisait le Congrès à établir et à percevoir un impôt fédéral sur les revenus
- le Dix-Septième Amendement (ratifié en 1913) prévoie la désignation des sénateurs au suffrage universel.

Président Woodrow Wilson (1913-1921)

La politique menée par W. Taft divise le Parti républicain et permet la victoire du démocrate Thomas W.Wilson Il entreprit trois grandes réformes:

"Underwood Act" signé le 3 octobre 1913, organise une révision des tarifs douaniers, afin "d'abolir tout ce qui peut, même de loin, ressembler à un privilège." Ces réductions imposées sur les matières premières et les denrées alimentaires, devaient abaisser le coût de la vie.

"Federal Reserve Act" adopté le le 23 décembre 1913, le Congrès vote une loi qui crée le Federal Reserve System dirigé par le Federal Reserve Board. Ce dernier contrôle les douzes banques fédérales "The Federal Reserve Bank". L'institution a pour missions principales la conduite de la politique monétaire des États-Unis, la régulation du système bancaire et la stabilisation du système financier américain.

• Le Congrès met en place la "Federal Trade Commission", afin d'émettre des ordonnances interdisant "les pratiques déloyales dans le domaine de la concurrence."

"Clayton Antitrust Act" (1914) condamnait l'imbrication des conseils d'administration, l'établissement de prix discriminatoires, le recours aux injonctions judiciaires dans le cadre de conflits du travail.

Les travailleurs bénéficièrent également de nouvelles dispositions:

"Federal Farm Loan Act", introduisait des prêts à taux réduits pour les agriculteurs;

"Seamen's Act", améliora les conditions de travail des marins.

"Federal Workingman's Compensation Act" prévoyait des indemnités pour les fonctionnaires victimes d'accident de travail

"Adamson Act", fixait la journée de travail des cheminots à huit heures.

• 1909 - La "National Conference on the Negro" se réunit le 30 mai. Elle donne lieu à la fondation de la "National Association for the Advancement of Colored People" (NAACP), l'une des plus puissantes organisations américaines de défense des droits civiques.

• L'élection au suffrage universel des sénateurs est instaurée (1913)

• Le 26 août 1920, par son 19ème amendement, la Constitution accorde le droit de vote aux femmes:

"Le droit de vote des citoyens des États-Unis ne pourra être dénié ou restreint pour cause de sexe par les États-Unis ni l'un quelconque des États. Le Congrès aura le pouvoir de donner effet au présent article par une législation appropriée".

Sources