La médecine de la Renaissance du XVe et du XVIe siècles

C'est à cette époque que les scientifiques et les théoriciens ont commencé à s'éloigner des points de vue traditionnels qui gouvernaient la médecine en Orient et en Occident.

Les connaissances se sont développées par le biais de la méthode scientifique : mise en œuvre d'expériences, collecte d'observations, conclusions. Une nouvelle technologie d'une importance majeure a permis la diffusion des informations : l'imprimerie.

I
Le souffle de la Renaissance

En médecine, comme dans le domaine des arts, des lettres et de la pensée, l’époque de la Renaissance s’étend sur deux siècles et demi - du milieu du XIVe à la fin du XVIe . Après le long enlisement du Moyen Age, voici que l’esprit humain rejette le carcan rigide de la scolastique aristotélicienne et se libère de ce que les contraintes spirituelles et traditionnelles avaient d’excessif et de paralysant.
L’invention de l’imprimerie allait fournir aux nouvelles acquisitions de la connaissance humaine le moyen de se répandre.

Simultanément, la multiplication des échanges diplomatiques et commerciaux, l’extension des voyages lointains, les explorations ouvraient un champs nouveau à l’étude des sciences naturelles.

L’humanisme de la Renaissance forme un tout difficilement dissociable dont la science médicale ne représente qu’une partie, mais une de celles qui exerçaient le plus d’attrait sur les esprits de l’époque, tels que Marsile Ficin (médecin des Médicis), Anutius Foesius (médecin de Metz, spécialiste en langues anciennes), Francis Bacon, Montaigne et François Rabelais qui disait : “Par fréquente anatomies (dissections), acquiers-toi la parfaite cognoissance de l’autre monde qui est l’homme”.

II
L'anatomie, première pierre de l'édifice

L’anatomie et la chirurgie au début de la Renaissance

A l’aube de la Renaissance, l’homme connaissait encore bien mal la structure de son propre corps. Il n’en savait guère plus que les Anciens Egyptiens pratiquant la technique de l’embaumement. L’anatomie telle qu’elle avait été décrite par Galien, en se basant sur la structure du singe, comportait autant d’erreurs que de vérités. L’interdiction formelle de disséquer pendant mille ans - édictée aussi bien dans les pays chrétiens que dans ceux d’obédiance coranique - rendit impossible tout progrès de l’anatomie.

En 1230, une ordonnance de Frédéric II, empereur d’Allemagne et roi des Deux-Siciles, avait subordonné le droit d’exercer la médecine à l’étude de l’anatomie pendant une année au moins. Quelques précurseurs anti-conformistes et courageux : Gérard de Crémone, Mondino dei Luzzi, Guy de Chauliac, Henri de Mondeville, puis Bertapaglia et Montagnana, firent quelques rares dissections mais les progrès furent très limités.

Les chirurgiens en faisaient cependant l’expérience, les connaissances anatomiques permettaient d’améliorer les opérations des hernies, de la pierre ou de la cataracte. L’amputation bénéficiait également des perfectionnements techniques :  Guido Guidi (1509-1569) en Italie; Félix Würtz (1518-1574) en Suisse; l’allemand Fabrice von Hilden (1560-1634); William Clowes (1544-1604) en Anfgleterre.

Jugé avec un recul de plus de quatre siècles et sur le seul plan de la médecine, le mérite principal et durable de la Renaissance, celui du XVI e siècle en particulier, a été de marquer la naissance et le développement de l’anatomie moderne.

La dissection

Le principal obstacle tenait à la pénurie de sujets d’étude. Malgrè la protection toujours fragile de quelques princes éclairés, les premiers anatomistes eurent à surmonter de grandes difficultés. Les amphithéâtres d’anatomie s’édifièrent lentement, à Padoue en 1490, à Leyde, à Bologne décidé en 1597 construit en 1637, à Montpellier en 1551 et Bâle en 1588, Paris en 1608. La dissection de cadavres humains exposait en effet à de graves sanctions de la part des autorités civiles et religieuses que hantaient, selon les cas, l’idée d’un meurtre camouflé ou la crainte d’une entreprise de sorcellerie.

Dans l’Empire germanique comme à Bologne en Italie, la dissection n’était autorisée qu’à raison d’un seul cadavre par an, publiquement en présence des autorités cigviles et religieuses; Lérida en Espagne disposait d’un corps tous les trois ans. A Montpellier, bien qu’autorisée depuis 1375, l’obtention d’un sujet d’anatomie était subordonnée à des formalités désespérantes. A Paris, la première dissection semble avoir eu lieu en 1478 ou 1494, le Collège des Chirurgiens avait droit à quatre cadavres par an.Certains comme Vésale en furent réduit à organiser des expéditions nocturnes aux gibet et au charnier des Innocents, afin de procéder à l’enlèvement clandestinde corps de suppliciés. En Italie les papes se montraient réticents et l’Inquisition exerçait un contôle vigilant. Nombreux furent ceux comme Miguel Servet, Carpi, Vésale qui, devant les tribunaux , payèrent de leur situation, de leur liberté ou de leur vie leur ardeur scientifique.

Dans certains Etats cependeant, la prévention dont les anatomistes étaient l’objet s’atténua rapidement. A Bologne, à Padoue et à Venis eoù Fallope était même autorisé à exécuter les condamnés à mort suivant le mode qui lui convenait pour pouvoir mieux les “anatomiser”. Les réunions anatomiques prirent même des allures de réjouissance mondaine, de spectacle et fourniront des sujets aux grands peintres flamands. La représentation plastique du corps humain s’affranchissait des règles du symbolisme : la vérité charnelle du nu met d’elle-même fin à l’interdit dont elle était frappée depuis les temps antiques. Les plus grands peintres dessinateurs et sculpteurs de la Renaissance cherchaient tout autant à perfectionner leur talent qu’à donner aux médecins l’appui de leur technique dans l’illustration de leur travaux. Il en fut ainsi de Michel-Ange, de Raphaël, de l’incomparable Léonard de Vinci, de Primatice, Paul Véronèse, Jean Etienne Calcar (élève du Titien).

Vésale fondateur de l’anatomie et de nombreux autres

La figure qui domine l’histoire de l’anatomie au XVI e siècle est celle d’André Vésale, considéré comme le principal réformateur de l’anatomie et par conséquent comme un des pionniers de la médecine moderne.

Il y eut aussi : Gabriel Fallope, d’Acquapendente, Carpi, Eustachhio et de nombreux autres anatomistes, la plupart italiens d’origine. D’autres ne sont jamais passés par l’Italie comme : Charles Etienne (décrit les veines du foie), Gonthier d’Andernach (traite des muscles et vaisseaux de la main et découvre le pancréas), Paaw, Platter, Bauhin, Jean Valverde de Amusco, enfin l’allemand Salomon Alberti (valvules veineuses et voies urinaires).

Ainsi, au début du XVI e siècle, la configuration macroscopique normale du corps humain était connue avec exactitude, dans ses structures essentielles, si ce n’est dans ses moindres détails et dans son absolue totalité. Ces données avaient été acquises en moins de deux siècles grâce à l’observation acharnée qui animait alors les hommes d’esprit.

La connaissance de l’anatomie a ouvert la voie aux premières grandes découvertes physiologiques qui se laissaient déjà entrevoir. Elle rendait possible l’abord de l’anatomie pathologique.

L’ère des recherches anatomiques n’était cependant pas close. Les trois siècles suivantsvont voiur se succéder les vérifications, les descriptions complémentaires et d’autres découvertes précieuses, parachevant l’œuvre des Maîtres de la Renaissance qui fur décisive pour l’avenir de la médecine.

III
Maladies, médecins et médecine à la Renaissance

Progrès et stagnation

Le développement de l’anatomie accompli, il n’en était pas de même des autres disciplines médicales. Cependant quelques praticiens ont su faire des anticipations géniales, dans l’identification des maladies infectieuses et leur mode de transmission; l’ophtalmologie, l’urologie et l’obstétrique connaissent aussi leur part de renouveau. Mais dans l’ensemble, les progrès n’avaient guère été sensibles depuis le Moyen Age. Les cliniciens de la Renaissance n’ont pas été à la hauteur de leurs contemporains anatomistes. La thérapeutique ne se dégageait pas non plus d’un immobilisme séculaire, l’astrologie, les “simples”, les saignées, les clystères et les purgatifs rivalisaient d’agressivité.
La Renaissance verra pourtant l’amorce d’un mouvement rénovateur dans le domaine de la pharmacologie.

L’humanisme contre la tradition

Dans tous ces domaines de l’Art médical, l’assaut contre le galénisme, encore tout puissant, fut dur et ne connut pas un succès immédiat. Les dogmes hérités du Maître de Pergame triomphèrent même pendant plus d’un siècle encore, grâce à la parole et à la plume de leurs ardents défenseurs. Ceux-ci groupaient notamment les “Très illustres médecins docteurs de l’Ecole de Médecine orthodoxe de Paris, gardiens de la vraie médecine hippocratique” dont Riolan et Gui Patin se réclamaient encore, avec zèle et ostentation, au milieu du XVIIe siècle.
Jean Fernel (médecin de Diane de Poitiers et de Henri II), père de la physiologie moderne, fut sans conteste le plus talentueux et le plus redoutable de ces combattants rétrogrades. Il réussit à rajeunir et à revaloriser pour ainsi dire l’œuvre de Galien, en la dégageant de la gangue d’apports confus qui l’avait alourdie au cours des siècles; et réussit à lui conférer une apparence dangereuse de modernisme.

Les esprits nouveaux ne purent s’attaquer à la redoutable forteresse galénique qu’isolément : leur hardiesse éclairée ne fut malheureusement pas toujours un gage de succès; Certains cherchèrent à créer une faille en opposant les opinions du Maître de Pergame à celles du Maître de Cos. Cette tentative fut peu fructueuse. D’autres engagèrent la lutte de front. Quelques uns en s’entourant de précautions oratoires : “Galien, après tout n’est pas infaillible”; d’autres , tel Paracelse en brûlant les ouvrages de Galien et le Canon d’Avicenne dans l’amphithéâtre de l’Université de Bâle.

Paracelse le réformateur

Paracelse fut alternativempent un réformateur génial ou un suppôt attardé de l’obscurantisme philosophique. Le pittoresque du personnage, le côté anecdotique de sa vie, les inconséquences de son caractère et de son humeur ne sont pas une légende. Son œuvre unique en son genre est un tissu de contradictions; une partie seulement projette sur l’avenir de la médecine des lueurs parfois prophétiques : il souhaite que la médecine s’attaque directement aux soins sur le corps et ne reste pas dans des grands discours et des incantations.

Ambroise Paré, grand chirurgien et grand médecin

Ambroise Paré est de ceux qui illustre le mieux ce qu’étaient les grands praticiens de la Renaissance. En toutes circonstances, le Père de la Chirurgie, qui soigna successivement quatre rois de France, fut un médecin accompli autant qu’un maître de l’Art manuel. Médecin militaire pendant un quart de siècle, il consacre la fin de sa vie à la rédaction de ses nombreux ouvrages et les soins des pauvres à l’hôpital ou à la clientèle aisée. Ses travaux ont porté, outre la chirurgie, sur l’urologie, l’ophtalmologie, la stomatologie, la physiologie sexuelle, l’obstétrique, la médecine légale. Ce huguenot libéral, qui dut à la protection de Charles IX d’échapper au massacre de la Saint-Barhélemy, faisait preuve en toutes circonstances de sentiments ardemment humanitaires.

Mais il se garda bien de placer son art au dessus de la religion, par prudence et habileté ; ainsi Ambroise Paré écrit à propos d’un de ses patients : "Je le pansai, Dieu le guérit", se rapprochant ainsi de la maxime des médecins arabes du moyen âge, "Après ce traitement, le malade guérira, si Dieu le veut ".

Naissance de la psychiatrie

Il est d’usage de situer la naissance de la psychiatrie moderne au XVI e siècle. Depuis les temps les plus reculés, les troubles mentaux ou nerveux étaient attribués à une origine surnaturelle. Au XVe siècle, les tribunaux ecclésiastiques maintenaient la démonomanie sous leur juridiction exclusive et sévère : les cas de “possession” passive relevaient de l’exorcisme et ceux de “sorcellerie” active, de l’autodafé (bûchers purificateurs). Le Suisse Félix Platter rédige le premier, un essai de classification des psychopathies.

Fracastor et la pathologie infectieuse

Presque insignifiant dans les autres domaines de la clinique, de la thérapeutique et de l’hygiène, l’apport de la Renaissance a été beaucoup plus substanciel en pathologie infectieuse. Jérôme Fracastor en est le principal artisan. Formé à Padoue, doté d’un esprit brillant et d’une érudition universelle, Fracastor crée une discipline nouvelle : l’épidémiologie. Il dégage le rôle fondamental de la contagion et affirme l’existence de micro-organismes infectants.

La grande vérole

Il traite de la grande vérole avec rigueur. Cette maladie très ancienne réapparaît et se développe dans les dernières années du XV e siècle (1493), sous forme de pandémie, d’une manière aussi foudroyante que meurtrière. La véritable panique qu’elle déclencha suscita dans tous les pays d’innombrables études et une abondante floraison de livres et d’opuscules dont quelques-uns seulement conservent un intérêt scientifique ou d’originalité. L’origine vénérienne de l’affection fut très vite reconnue et sa contagiosté fut assez vite admise d’une façon presque unanime.
La gravité du mal fut compensée sans délai par le recours à une thérapeutique opérante (le mercure et le bois de gaïac). Tandis que l’Église préconisait en vain la prophylaxie par la chasteté et que Fallope osait braver les principes moraux les plus solidement établis en proposant l’emploi de préservatifs, les gouvernements prenaient diverses dispositions rigoureuses dont l’efficacité ne tarda pas à se faire sentir. Cette épidémie marque un tournant historique décisif. Elle est à l’origine d’une des premières identifications nosologiques, d’une des premières réalisations thérapeutiques efficaces, d’un des premières tentatives raisonnées de prophylaxie à grande échelle.

Les autres maladies infectieuses

D’autres maladies infectieuses retinrent également l’attention. Le typhus exanthématique longtemps confondu avec la peste, la fièvre typhoïde et d’autres fièvres. Fracastor l’identifie pour la première fois avec netteté ett dreconnait sa transmission inter humaine. Cardan différencie l’éruption du typhus de celle de la rougeole et insiste sur sa transmission par les parasites du corps (puces).
Le choléra asiatique est observé par le Portugais Garcia da Orta, la rage par Jean Bauhin, la dysenterie par Fabrice von Hilden. Mais également la fièvre scarlatine est observée par Ingrassia et Jean Coyttard, les symptômes de la grippe sont décrits par Lusitanus. Guillaume de Baillou apporte des précisions sur la variole et entrevoit le croup de la diphtérie et identifie la “tussis quintana” (coqueluche, par allusion au capuchon dont on coiffait certains malades réputés contagieux).
Fracastor projeta des idées nouvelles sur la tuberculose, confondue depuis Hippocrate sous le nom de “phtisie” avec toutes les affections pulmonaires chroniques.

A partir de la pathologie infectieuse, la notion de contagion (directe, indirecte ou à distance) entraîna la création de l’hygiène publique dont le médecinn israélite David de Pomis fut un des premiers à établir les règles pratiques dans son ouvrage : “Courts et eficaces moyens de préserver une cité d’un mal contagieux” (Venise 1577).

l’enseignement et l'exercice de la médecine

Au 16ème siècle l'enseignement a peu changé. Il est assuré par deux professeurs, l'un pour les "choses naturelles", le second pour les "choses non naturelles".

L'enseignement à l'hôpital
A cet enseignement théorique au Collège, se rattache un enseignement pratique à l'hôpital. Nous avons vu que les chirurgiens donnaient des soins gratuits le premier lundi de chaque mois dans l'église Saint-Côme, puis dans l'appentis ajouté en 1554, enfin dans le collège. Les élèves suivaient aussi les visites hospitalières à l'hôtel-Dieu et à la Charité et l'on peut constater qu'il existait déjà une sorte d'externat et d'internat.

Les étudiants qui se destinaient à exercer en banlieue de Paris ou dans le vicomté ou la prévôté de Paris devaient avoir suivi cinq ans d'études dont trois ans dans les hôpitaux. Ils étaient alors "garçons chirurgiens", puis "compagnons", logés, nourris, chauffés, éclairés et blanchis à l'hôtel-Dieu. Ils étaient aidés par les "commissionnés" qui les remplaçaient par la suite lorsqu'ils quittaient l'hôpital. Le règlement imposé aux compagnons était très strict, la bienséance est recommandée, nul ne doit visiter une femme sans la présence d'une autre femme, et bien sûr, ne jamais s'enfermer avec une patiente. Les garçons-chirurgiens portent le tablier blanc et il leur incombe spécialement de pratiquer les saignées.

Au plus bas de l'échelle se trouve l'élève, nous pourrions dire l'externe. Il n'est ni logé, ni nourri, il doit être âgé d'au moins dix-huit ans, se présenter au bureau avec un certificat de bonne vie et mœurs signé par son curé. Plus tard, il lui faudra passer un examen devant deux médecins, le maître chirurgien et le compagnon gagnant maîtrise.

A partir de 1662, les élèves reçus externes et commissionnés devaient un droit de lancettes, c'est-à-dire qu'ils devaient donner au maître chirurgien et au compagnon gagnant maîtrise deux lancettes neuves et une à chacun des douze compagnons.

Il n'y avait qu'un maître chirurgien à l'Hôtel-Dieu, aidé par une sorte de chef de clinique, le "compagnon gagnant maîtrise". Ce dernier avait une fonction fortement enviée car il faisait un stage de six ans et pouvait ainsi beaucoup apprendre. C'est en 1585 que le terme de "gagnant maîtrise" est employé. Il donne le privilège d'être dispensé du diplôme de maître es arts normalement obligatoire pour être maître chirurgien juré, de la soutenance de thèse et du "chef-d'œuvre", soit une série d'examens qui se déroulaient de la façon suivante. L'immatricule, le premier était une simple formalité, puis la "tentative" portait sur la physiologie. Ensuite venait le "premier examen", deux mois après la "tentative" : neuf maîtres interrogeaient l'élève sur la pathologie chirurgicale. Il y avait ensuite les examens des quatre semaines. D'abord interrogé quatre jours dans la première semaine sur l'ostéologie, le candidat était ensuite questionné sur l'anatomie, les opérations qu'il faisait sur le cadavre ! la quatrième semaine était réservée aux médicaments. Lors du dernier examen, l'élève devait répondre à des questions sur la thérapeutique chirurgicale, enfin il soutenait une thèse latine sur un sujet de chirurgie devant le doyen de la Faculté de Médecine, deux docteurs régents, le lieutenant du premier chirurgien du roi, les quatre prévôts et des officiers du corps des maîtres en chirurgie. Enfin il était chirurgien !

Le service médical de l'Hôtel-Dieu était assuré par les docteurs régents de la Faculté. Ces derniers avaient autorité sur les chirurgiens et lors des opérations importantes, comme la trépanation ou l'amputation, trois médecins devaient auparavant donner leur avis et l'un d'eux assistait à l'acte chirurgical.

 

A la fin du XVI e siècle la médecine a intégré la vie intellectuelle et sociale en Europe.

La profession médicale, désormais réservée aux laïcs, voit en effet sa position s’affirmer avec prééminence. Des dispositions légales en définissent les statuts, les droits et les obligations, subordonné à la délivrance préalable d’un diplôme d’Etat ou d’Université.

Si les conditions d’exercice laissent - et laisseront encore pendant longtemps - beaucoup à désirer, l’enseignement prend une ampleur jusque là inconnue. Le recrutement des maîtres les plus prestigieux se fait avec la participation des étudiants; ceux-ci interviennent même dans l’administration de leurs facultés respectives, sans distinction de nationalité, de classe ni de confession. Les frais d’inscription restent élevés. Le corps enseignant sauvegarde jalousement son autonomie. Les lectures commentées de naguère ont fait place à des travaux pratiques et à des discussions libres dirigées par le professeur en personne. L’enseignement de la clinique est pratiquement inexistant. Les artistes les plus célèbres s’honorent de faire le portrait, en peinture ou en sculpture, des maîtres et des praticiens de renom.

Les médecins sont de plus en plus reconnus dans la société. Il n’est guère de grand praticien de la Renaissance qui n’ait été, à un moment ou à un titre quelconque, médecin de prince ou de roi, de pape ou d’empereur.

Cependant quelques esprits sectaires ou rétrogrades ne manquaient pas d’entretenir des discussions stériles. L’attitude de ces hableurs et faux savants prêtait au ridicule au risque de former des Thomas Diafoirus (Molière dans le Malade imaginaire).

La médecine et la chirurgie prennent l’importance qui leur revient dans l’armature de l’État (dans les municipalités, dans l’armée, dans les missions diplomatiques). Mais il perdure de nombreux endroits où les soins ne sont pas ordonnés par les médecins. Dans le meilleur des cas, des moines ou des religieuses déterminent eux même les soins à donner, et se réfèrent au savoir médical. Mais ailleurs la pratique revient aux sans diplômes, aux rebouteux (qui réduisent fractures et luxations) et aux herniers (qui traitent les hernies). L’art de médecin s’oppose alors au terme de charlatan, terme qui voit le jour pour qualifier ce qui crient (ciarlare) pour recruter sur les foires et les marchés.
Les charlatans sont condamnés par les universités.

Bilan de la médecine à la fin de la Renaissance

La Renaissance a donc entraîné une véritable révolution libératrice dans l’histoire de la médecine et des médecins. Mais beaucoup d’efforts méritoires sont demeurés vains et sans effets pratiques. La plupart des faits observés et des théories émises durent être redécouverts par la suite. Le travail accompli demeura pour une grande part sans lendemain. Trop prompte, la pensée de l’homme avait outrepassé les possibilités techniques de l’heure.

Ainsi, à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe, les grandes professions de médecins, chirurgiens, apothicaires, sont individualisées et s’organisent à un niveau universitaire au plan européen. La rationalité et la démarche scientifique et humaniste s’installent alors dans ces métiers et ouvrent le chemin de la médecine moderne.

 

Sources

- Bariéty M. , Coury CH. - Histoire de la Médecine. Librairie Arthème Fayard , 1963 pages 401-468