Antoine GAILLETON

1829 - 1904

Médecin et politicien lyonnais

Antoine Gailleton eut deux vocations au cours de son existence :
- Médicale qu'il exerça en tant que Chirurgien Major de l'hôpital de l'Antiquaille à Lyon.
- Politique qu'il mit en pratique en tant que Conseiller municipal de Lyon dès 1870 ; puis nommé Maire de la Capitale des Gaules (Caput Galliae) par décret du 23 avril 1881, il le restera jusqu'en 1900.

Antoine Gailleton est né à Lyon le 17 novembre 1829, dans une modeste famille. Les conditions de sa naissance, anecdotique, mérite d’être contée. Sa mère, Antoinette Pulliat, se rend en ville et passe sur le pont du Change. Prise de douleurs, elle est alors recueillie dans une casemate de gendarmes, située au milieu du pont et donne naissance à Antoine…

Vocation médicale

Antoine Gailleton s'inscrit à l'Ecole préparatoire de Médecine de Lyon en 1847, il fut classé troisième au concours de l'Internat des Hôpitaux de Lyon. et docteur en médecine en 1854. Il passe sa thèse de doctorat à Paris en 1854 ("De la grossesse extra-utérine"). Après deux échecs, il est brillamment reçu au concours du Majorat de l'hôpital de l'Antiquaille de Lyon en 1858.

En 1864, il succéda au vénéréologue Joseph Rollet à l'Hôpital de l'Antiquaille comme chirurgien major. En 1877, à la création de la Faculté mixte de Médecine et de Pharmacie, il se vit proposer la Chaire de Clinique des Maladies cutanées et syphilitiques.

L'Antiquaille,

situé sur la colline de Fourvière, l'Antiquaille fut entre 1803 et 1830 un hospice, dont la vocation initiale était de soigner les vénériens et les galeux des deux sexes. De 1830 à 1876, l'hospice devint un asile-hôpital ne se consacrant qu'aux soins des aliénés et aux malades porteurs de maladies vénériennes et de la peau. Le service chirurgical est alors représenté par le chirurgien-major nommé par concours pour six ans. Après le départ des aliénés en 1876 et la création de la chaire des maladies cutanées et syphilitiques en 1877, l'Antiquaille devient un hôpital de spécialité dermato-vénéréologique jusqu'au début de notre siècle.

L'Ecole de l'Antiquaille a été fondée par le premier chirurgien-major, Prosper Baumès (1791-1871). En six ans, de 1837 à 1842, il va transformer un hospice de vénériens en la première école dermato-vénéréologique de province. Les successeurs de Baumès et prédécesseurs de Gailleton seront Paul Diday (1813-1894), Alexandre Rodet (1814-1884) et Joseph Rollet (1824-1894). Ils vont conforter et développer l'importance de cette école. Cette filiation explique comment la dermatologie fut, à Lyon, à l'origine chirurgicale !

En 1857 Antoine Gailleton publie un mémoire d'agrégation sous le titre : "Quelles sont les conditions qui assurent le mieux les succès des grandes opérations chirurgicales ? ". Gailleton chirurgien-major est le premier à bénéficier d'une durée de majorat de 18 ans. D'abord chirurgien aide-major de 1858 à 1864, il est responsable du service des enfants teigneux, galeux, dartreux ou scrofuleux. Chirurgien-major de 1864 à 1869, chargé des hommes vénériens, il laisse le souvenir d'un excellent clinicien et d'un enseignant exceptionnel qui attirait les étudiants en foule. Il publie en 1866 : "Des conditions d'admission à l'hospice de l'Antiquaille".
Enfin, de 1870 à 1876, Gailleton occupe le poste de chirurgien des Chazeaux (service des femmes et de la crèche) créé à son intention.

Antoine Gailleton est, lors de la création de la Faculté de médecine de Lyon en 1877, le premier titulaire de la Chaire des maladies cutanées et syphilitiques, qu'il occupe jusqu'à sa mort en 1904. Remarquons que cette Chaire fut créée trois ans avant celle de Paris, dont Alfred Fournier fut le premier titulaire de 1880 à 1902.

Son activité hospitalière s'est fortement ralentie de 1881 à 1900 alors qu'il est maire de Lyon, mais va reprendre de 1900 à 1904. En 1904, il obtient la création d'une seconde clinique à l'Hôtel-Dieu proposant des consultations à huit heures du soir pour les ouvriers.

L'œuvre dermato-vénéréologique d'Antoine Gailleton est modeste. A côté de nombreux articles dans la presse médicale et la publication de quelques brochures sur l'eczéma, la dartre, l'étiologie des maladies cutanées des enfants, nous retiendrons surtout son "Traité élémentaire des maladies de la peau" de 304 pages, publié à Paris en 1874. Il s'agit d'un traité synthétique, un guide qui résume bien les conceptions de l'époque, sans proposer une énième nouvelle classification.

Vocation politique

Antoine Gailleton
Portrait d'Antoine Gailleton, par J. Chambe, 2e moitié XIXe siècle

Gailleton a toujours été un républicain convaincu, préoccupé des problèmes sociaux, des intérêts de ses concitoyens et de la prospérité de sa ville. Anticlérical et franc-maçon, il va toutefois évoluer vers un certain conservatisme.

Ses premiers pas en politique sont précoces; il fait partie du premier Comité Central Républicain lors de la Révolution de 1848 puis prend une part active aux luttes républicaines sous l'Empire.

En 1870, à la chute du Second Empire, Antoine Gailleton est désigné parmi les membres du Comité de Salut Public qui prend en main le sort de la ville et proclame la IIIe République le 4 septembre 1870; (c'est en souvenir de ce jour que de nombreuses rues de France portent le nom du "Quatre Septembre"). Aux premières élections du 15 septembre, Gailleton est élu conseiller municipal, sous les mandats de Jacques Hénon puis Désiré Barodet. Il entreprend de rétablir l'autonomie administrative de la ville et participe aux premières démarches pour favoriser la création d'une Faculté de Médecine à Lyon.

Le Conseil municipal lyonnais, élu en juin 1873, s’oppose très vivement au Préfet. Le conflit aboutit au retour du système du Second Empire : c’est le Préfet qui gouverne la ville avec une commission municipale qu’il choisit. En novembre 1874, bénéficiant d’un léger progrès, l’assemblée municipale élue a le droit de désigner un président ; elle choisit Antoine Gailleton. C’est dire que la première accession de Gailleton en 1881 à la mairie de Lyon signe le retour à une indépendance municipale, mais elle est encore contrôlée puisqu’il est maire "nommé". Lorsqu’enfin avec la loi du 28 mars 1882 sur les municipalités, la population lyonnaise peut élire son maire, Gailleton est plébiscité.

En 1888, il fait entrer au Conseil municipal, son ancien élève et successeur à l'Antiquaille : Victor Augagneur dont l'ambition politique est nationale.... Mais au cours des années, des divergences entre les deux hommes apparaissent… La combativité d’Augagneur trouve son aboutissement le 20 mai 1900 : il devient maire de Lyon. Antoine Gailleton battu après avoir occupé le poste de Maire de Lyon pendant 19 ans, reste, jusqu’à sa mort, conseiller municipal. Il reprit au terme de cette activité son poste hospitalier à l'Antiquaille pendant quelques années.

"République des médecins"! Gailleton fut un maire très populaire ; les lyonnais le surnommèrent "le père Gailleton" ou "le Toine"!

Les réalisations d'Antoine Gailleton :

Durant ses mandats, cet ardent républicain met en place un vaste programme d’actions.
L’homme de sciences qu’il est fait porter ses efforts sur :
• l’amélioration de l’hygiène publique avec les créations d’un service des eaux de conception moderne et d’un bureau d’hygiène en 1890 ;

Il est à l’origine d’une grande ère de grands travaux d’urbanisme :
•La modernisation des transports en commun, avec les tramways électriques, qui facilitent la pénétration de quartiers nouveaux dès 1896.
• la démolition, l'aménagement de certains secteurs urbains : quartiers Grolée, Saint-Paul
• le dégagement des quartiers Saint-Paul et de La Martinière ;
• le renouvellement ou construction de ponts : Galliéni, de la Boucle, Morand
• Le monument des Jacobins : le visage actuel de la place reflète enfin celui de la République. Il présente les effigies de quatre artistes célèbres que Lyon a vu naître et dont la gloire a rayonné sur l'art français. La nouvelle place des Jacobins naît d'un concours ouvert en 1877. Sont retenus le projet de Gaspard André, les modèles de statues créés par Degeorges et réalisés par Busque. La conception des quatre sirènes est confiée à Delaplanche. Deux modeleurs, Campagne et Lavigne, sont chargés de l'ornementation. La réception générale des travaux a lieu le 20 décembre 1881.
• Le monument aux enfants du Rhône, situé à l'entrée du parc de la Tête d'Or.
• La préfecture, cours de la Liberté (3e arrondissement), la préfecture du Rhône s'installe au début du XIXème siècle dans les bâtiments désaffectés du couvent des Jacobins, et la place prend le nom de place de la Préfecture.
• La fontaine Bartholdi : cette fontaine place des Terreaux, devenue trop cher pour la ville de Bordeaux, fut racheté en 1890 par Antoine Gailleton, alors maire de Lyon.

Gailleton s’intéresse aussi à l’enseignement, secondé en cela par l’architecte en chef de la Ville, Abraham Hirsch :
• construction d’un grand nombre d’écoles primaires ;
• réalisation de la Faculté de médecine.

 

Antoine Gailleton mourut le 9 octobre 1904. En 1910, son nom fut donné au quai longeant l'hôpital de la Charité. Antoine Gailleton fut un des fondateurs du Lyon Médical et publia un "Traité élémentaire des maladies de la peau" en 1874. Sa popularité était telle que les lyonnais le dénommèrent le père Gailleton. Il créa le bureau public d'Hygiène. C'est avec lui que débuta l'ère des grands travaux notamment au niveau de la presqu'île (

ll se marie deux fois et a trois enfants de sa première épouse.

Grand Officier de la Légion d'Honneur en 1895, il décède le 9 octobre 1904 à l'âge de 75 ans. Une énorme foule assiste à ses funérailles.

Par délibération du Conseil municipal le 29 avril 1907 , le quai de la Charité devient le quai Gailleton (2ème) et la place Grolier la place Gailleton (2ème); par délibération du Conseil municipal le 22 juillet 1907, il est décidé la construction d'un monument à Antoine Gailleton qui est inauguré le 15 janvier 1915.

Cette double vocation médicale et politique, fréquente à Lyon, fait de Gailleton un personnage attachant et marquant de la fin du XIXème siècle.

 

Sources

• LACROIX Anne: ANTOINE GAILLETON (1829-1904). Une double vocation: Médecin, Chirurgien-major de l'Antiquaille, Professeur de clinique des maladies cutanées et syphilitiques et Maire de Lyon. Président : Pr Louis Fischer. Thèse Médecine Lyon 1997, n°125.

Archives municipales de Lyon